Brouillon du décret d’abolition de l’esclavage annoté par Schoelcher.
A partir de 1830 se met en place une législation visant à améliorer les conditions matérielles et morales des esclaves. Grâce à la lutte des hommes libres de couleur pour la reconnaissance de leurs droits civiques, un courant de pensée et de revendication abolitionniste voit le jour animé par Victor Schoelcher. De ses voyages dans les Caraïbes en 1840-1841, il rapporte une analyse minutieuse du système esclavagiste et la conviction que l’esclavage doit être aboli immédiatement.
Le 24 février 1848 un Gouvernement provisoire républicain est formé au lendemain des journées révolutionnaires que vient de connaître la capitale. Le « droit au travail » et la création d’ateliers nationaux, l’abolition de la peine de mort en matière politique, l’instauration du suffrage universel masculin font l’objet des premières décisions prises à l’Hôtel de Ville de Paris.
Le principe de l’abolition de l’esclavage fait lui-même l’objet d’une proclamation dès le 25 février.
Le 3 mars Schoelcher persuade Arago, ministre de la Marine et des Colonies, de la nécessité de proclamer une abolition immédiate de l’esclavage, afin d’éviter le risque d’une répétition des événements de Saint-Domingue en 1804. Le gouvernement publie dès le lendemain un décret signé d’Arago, indiquant qu’« aucune terre française ne peut plus porter d’esclaves ». Le ministre délègue ses pouvoirs relatifs aux colonies à Schœlcher qui est nommé sous-secrétaire d’État aux Colonies avec mission de « régler l’affaire des colonies et de l’émancipation ». Il devient président de la Commission d’abolition de l’esclavage mise en place à cet effet.
Schœlcher fait appel, comme membres de cette commission, à Henri-Joseph Mestro, directeur des Colonies au ministère de la Marine, Auguste-François Perrinon, homme de couleur d’origine martiniquaise, polytechnicien, chef de bataillon d’artillerie de Marine, auteur d’un article paru quelques années plus tôt sur son expérience d’emploi d’ouvriers libres sur ses salines de Saint-Martin, Adolphe Gatine, avocat aux conseils, défenseur, notamment, des hommes de couleur de Martinique accusés de complots et troubles politiques dans les années 1820 et 1830, Charles Gaumont, ouvrier horloger, investi dans les mouvements ouvriers parisiens, rédacteur à L’Union, bulletin des ouvriers rédigé et publié par eux-mêmes qui avait lancé en 1844 la pétition des ouvriers de Paris en faveur de l’abolition de l’esclavage, Henri Wallon, historien, auteur d’une Histoire de l’esclavage dans l’Antiquité, secrétaire de la commission, et Louis Percin, avocat d’origine martiniquaise, secrétaire adjoint. La commission d’abolition se réunit du 6 mars au 21 juillet 1848.
Schœlcher remet au Gouvernement provisoire un premier rapport sur les travaux de la commission et les textes des décrets soumis à signature le 27 avril 1848, quelques jours avant la première réunion de l’Assemblée nationale constituante tout juste élue. Il indique dans ce premier rapport de la commission d’émancipation, rédigé avec l’historien Henri Wallon, que cette dernière a entrepris un « grand acte de réparation d’un crime de lèse-humanité ».
Le décret du 27 avril 1848 abolit l’esclavage de manière « immédiate », contrairement au précédent britannique qui avait instauré une émancipation.
Il confère aux « nouveaux libres » un statut et des droits de citoyens et confie à une commission spéciale la préparation d’une indemnisation à verser aux anciens propriétaires d’esclaves.
FR ANOM Généralités 119/1061